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A notre princesse, à notre étoile, à notre Aimée
2 octobre 2015

29 septembre, un an après l'annonce

Ma douce Aimée,

Bien longtemps que je n'ai rien écrit ! Comme je te l'avais dit, je viendrai quand j'en aurai besoin ou envie. Cela fait quelques jours que je voulais t'écrire mais je n'avais pas trop le temps et j'ai été malade mais aujourd'hui je prends ce temps important pour moi.

Tu sais que le temps s'écoule imanquablement et que nous ne pouvons rien y changer. Tu sais aussi que le temps apaise, panse les blessures les plus profondes. Mais tu sais aussi que le temps n'efface rien. 

Nous rentrons dans des dates fortes en symbole pour nous, je ne les vis pas de la même manière, pas avec la même intensité mais j'ai le sentiment que tant que ces dates symboliques ne sont pas passées, je ne pourrais pas aller de l'avant convenablement, que quelque chose me retient au passé. Je me retrouve entre deux eaux mais je me rapproche du bord et je vais pouvoir m'en sortir.

Nous venons de passer les 1 an de l'annonce de tes malformations. A l'heure actuelle, il y a un an nous enchaînions les rendez-vous médicaux pour savoir ce que tu avais, ce qui allait se passer, ce que l'on devait faire. Nous étions dans une période de flou terrible où ce qui nous tenait debout ce n'était plus nous mais une sorte d'instinct (de survie ?). Je ne sais pas encore à l'heure actuelle comment on a fait pour tenir mais le fait est là on a tenu et plutôt pas mal vu tout ce que l'on a pu mettre en place pour toi.

Je me suis rendue compte depuis la fin de mois d'août que je ressentais un sentiment nouveau qui m'a fait pleurer : j'ai regrété de t'avoir eu. Je m'en suis beaucoup voulu mais le fait est là, oui j'aurais préféré ne jamais avoir à vivre ça. Tu sais, j'ai désiré un bébé, nous t'avons conçu, nous avons appris, nous t'avons accompagné. Tout cela je ne le regrette pas car c'est ce que l'on devait vivre. Mais tout aurait été plus simple si ce 29 septembre on nous avait annoncé autre chose. Je me rappelle que je n'étais pas confiante quand je suis allée à cette échographie et je m'attendais à une mauvaise nouvelle. Mais pas celle là. Je pensais qu'on allait me dire que ton coeur s'était arrêté, que c'était fini. Bien sûr, j'aurais été anéantie, sidérée et effondrée d'une telle nouvelle car je te voulais par dessus tout mais je m'en serais remise. Mais le fait de m'avoir annoncé que tu étais vivante mais prisonnière d'un corps qui ne te permettait pas de vivre, ce n'est pas annoncer que tu n'es plus. C'est nous faire basculer dans un autre monde, celui de parents qui doivent prendre une décision pour leur enfant. On nous a demandé ce que l'on comptait faire et c'est bien normal, personne d'autre que nous ne pouvait décider de cela. Mais c'est l'annonce même de ta fin programmée qui m'a propulsée au statut de maman. On m'aurait annoncé que ton coeur ne battait plus, on en serait resté là, une fausse couche. Mais ce n'est pas ça qui nous a été dit et demandé. Ce n'est pas que c'est plus ou moins dur mais c'est que c'est différent. Quand j'ai fait ces deux fausses couches après toi, c'est dur, triste, injuste et tout ce que tu veux mais on le sait, ça peut arriver, et on ne décide pas d'arrêter. Ce qui m'a fait devenir ta maman c'est ce mot : DECIDER. Avant l'écho, je ne me projetais pas avec toi, je ne te considérais pas comme mon bébé, j'étais enceinte et on attendait l'écho qui allait nous autoriser à y croire. Après cette annonce, je me suis surprise à me poser des questions de maman "que vont-ils faire de ton corps", "es-tu une fille ou un garçon", "vas-tu souffrir", "quelles options sont possibles pour toi",... Et j'ai eu besoin de toutes ces réponses pour avancer et accepter de te laisser partir. C'est en cela que l'IMG diffère de la fausse couche. On nous a demander de choisir et de décider.

Tu sais Aimée, même si cette décision était évidente et vue de l'extérieur, il n'y avait pas à réfléchir (nous l'avons d'ailleurs bien senti, on a minimisé et on minimise encore aujourd'hui notre épreuve) mais ce n'est pas si simple quand on la vit. Je savais qu'il n'y avait pas d'espoir pour toi mais je n'en étais pas convaincu. Quand j'envoyais les nouvelles des RDV aux proches je leur dressais le tableau le plus noir pour les préserver et aussi pour me montrer que c'était très grave. Mais au fond de moi, il y avait quelque chose qui m'empêchait de me dire qu'il n'y avait pas d'autres solutions. Tu sais, le jour où j'ai appris que tu étais atteinte d'une translocation, c'était le mercredi précédent ton départ. Nous avions déjà signé les papiers, le RDV était pris mais quand la sage-femme m'a appelé et m'a dit "On a eu les résultats, on sait ce que c'est", j'ai eu une boule au coeur et j'ai cru qu'ils allaient pouvoir te sauver. Alors tu vois, même 15 jours après l'annonce de la gravité de tes malformations et même si on s'était fait une raison, j'y croyais encore un peu. Et là, c'est ce jour-là que j'ai compris que non c'était fini. La sage-femme m'a dit qu'ils n'avaient pas pensé à une translocation car tu n'aurais jamais dû t'accrocher avec ce que tu avais. Mais tu étais forte alors tu t'es accrochée et c'est pour cela que tout cela a un tout petit peu de sens aujourd'hui.

Mais oui ma princesse, j'aurais aimé que tu ne t'accroches pas, je n'aurais pas eu besoin d'être forte, pas eu besoin de pleurer autant, pas eu besoin de me sentir aussi seule et incomprise,... Mais la vie en a décidé autrement et j'assume cela, je n'aime pas les regrets et je préfère aller de l'avant en positivant et en rendant plus doux les épreuves passées, en les transformant en expériences de vie qui nous révèlent. Tu m'as beaucoup apporté alors c'est cela que je retiens, je te l'ai déjà dit mais si je garde le positif, il n'en est pas moins que tu as laissé une grande faiblesse en moi qui ne s'estompe pas vraiment. Je doute qu'elle disparaîsse totalement un jour. Une cicatrice en moi comme pour me rappeler chaque jour de me battre pour ceux que j'aime.

Aujourd'hui mon Aimée, nous allons arriver à ton premier angiversaire et je te demande de veiller sur nous de ton étoile et de nous permettre d'aller de l'avant. La roue va tourner, toutes les premières fois vont être passées et je veux que tu nous laisses nous reconstruire avec ton souvenir mais sans ton obsession. Nous avons fait ce que nous devions pour toi par amour, nous sommes tes parents mais la vie continue et laisse-nous la vivre. Nous ne t'oublierons jamais, nous ne te remplacerons jamais, nous défendrons ta petite existence auprès de nos proches trop mutiques sur le sujet dès qu'ils dépasseront les limites. Mais nous voulons avancer et avoir un troisième enfant, laisse-moi le porter, laisse-moi redevenir une maman.

Je t'aime ma princesse

Maman

 

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A notre princesse, à notre étoile, à notre Aimée
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